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Retour d'expérience sur l'achat de leads avec Sortlist

Sortlist est un annuaire d’agences en marketing et services de publicités, commercialisant des leads.

Fondée en 2014, dans la sphère Nest’Up, nous avions tenté comme agence une expérience en 2015 puis en 2016 avec ce fournisseur de leads. Notre expérience n’a pour l’instant pas été totalement concluante.

Ce qui nous plaît

Ce que nous avons aimé c’est l’outil mis en oeuvre, la gestion par email d’un funnel d’affaires qui correspond bien à nos attentes en termes de taille de projets, portée de ceux-ci, Sortlist fait se rencontrer l’offre et la demande avec un certaine justesse.

Economiquement c’est aussi porteur. Le modèle sur papier est attirant : en fonction du montant du projet vous rétribuez +/- 1% du montant à Sortlist pour obtenir un des 5 sièges qui seront mis en contact avec le client. Sortlist screene les projets entrant et dirige ceux-ci vers un nombre d’agences choisies. A 100€/200€ le lead, c’est une bonne affaire si vous le convertissez. Si vous n’êtes pas repris la mise de départ est négligeable et ce n’est pas grave.

Les failles

Ce modèle révèle malheureusement assez vite ses failles sur des cas limites que Sortlist devrait mieux prendre en compte pour capitaliser sur son nom, sa qualité et ne pas laisser quelques brebis galeuses lui pourrir son image.

Ce que nous avons constaté à l’usage c’est un ensemble de comportements chez les leads et les consultants Sortlist qui in fine grève la qualité des échanges et la volonté de donner suite à ce genre de demandes.

La surévaluation financière du projet

La surévaluation du projet est un risque.  Mieux vaut annoncer un projet à 20.000€ aux agences, même si le lead vous annonce lors du premier contact que son budget c’est plutôt 15.000€, la commission et l’attractivité sont plus grandes. Et la difficulté de devoir tenir un budget plus serré pour des ambitions inchangées n’est perçu comme un défaut que par l’agence.

La non obligation de mise en place du projet

Poster un projet est toujours gratuitLa gratuité des projets côté client est, en filigrane, une absence d’engagement à faire appel aux agences consultées. Cette gratuité ne donne que peu de gages quant à la réalité de l’intention de contracter des leads.

Les leads peuvent faire, aux frais des agences, un tour de celles-ci pour partir à la pèche aux idées, aux concepts, aux approches et in fine s’en retourner à leur prestataire d’origine. Ce cas vécu est sans doute le plus troublant, que cela ait toujours existé bien sûr, mais que le pigeon doivent payer pour se faire plumer c’est assez neuf.

 

Le non respect du nombre de sièges

Lors de la présentation d’un lead aux agences sélectionnées, où Sortlist fait le match entre les besoins du client et les services proposés par les agences référencées,  un nombre de sièges est annoncé (généralement 5). Celui-ci est très théorique et ne correspond pas toujours à la réalité. De nombreux leads nous ont confiés qu’en plus des 5 sièges de Sortist, d’autres agences ont été contactées en direct. Quelle est la valeur d’un siège qui n’est garant de rien ? Les agences Sortlist ne sont-elles consultées que pour cadrer les prix et mettre la pression sur les agences contactées en direct ? 

Le peu d’implication de certains leads

Un lead Sortlist ne donne aucune garantie quant au fait de réellement rencontrer le client et aucune garantie quant au fait que le client souhaite nous rencontrer.  Cas vécu : bien qu’il y ait un contact établi sur la plateforme de messagerie interne de Sortlist, le contact a stoppé les échanges sur un « je vous recontacte prochainement ». Les relances sur différents supports n’ont pas porté leurs fruits.

Il apparait que certains leads ont déjà pas mal de chats à fouetter avec les autres agences et ne se sentent pas dans l’obligation de les traiter toutes de la même manière.

Les descriptifs sommaires de projet

C’est la loi du genre : Sortlist va vous en dire suffisamment pour vous allécher mais se gardera évidemment des détails vous permettant d’entrer en contact direct avec le lead.

Si c’est de bonne guerre, la réalité de terrain (comprenez, en rendez-vous de prospection) a montré des cahiers des charges lacunaires, des demandes approximatives voire des points de précision excluant certains participants sur les exigences technologiques, par exemple. De facto un prospect qui tient à telle ou telle option technologique est un lead perdu car vous n’allez pas en tant qu’agence monter sur une techno que vous ne voulez pas mettre en oeuvre. Le découvrir après paiement est évidemment moins agréable qu’avant…

Un screening de surface

La qualité du filtrage sur les petits projets est, à l’heure actuelle, à la hauteur du prix demandé par Sortlist pour accepter et faire un review de ces projets : bradé.

On y voit des consultants engagés par des leads contacter leur réseau, plus prendre 5 agences sur Sortlist, pour in fine proposer les offres aux leads uniquement si une rétro-commission de 15% est versée au consultant. Sortlist sert donc à certains à s’assurer des revenus sur le dos d’agences qui auraient payé un lead 2 fois. Valider que c’est bien une société qui cherche à porter un projet et pas un consultant qui veut renforcer une position de nouvel intermédiaire permettrait d’éviter ce genre de mésaventure. L’argument de vente mis en avant sur la page de lead « Ce projet a été vérifié par téléphone. » n’est au final pas un gage de qualité. Tout le monde peut faire écho d’expérience où une conversation téléphonique n’est pas un gage de succès pour la suite d’une relation.

Sortlist, pour qui, pour quoi ?

A toutes fins utiles, on fera un règle de trois pour calculer la chance de voir un projet aboutir. Si comme l’annonce la homepage de Sortlist 30 projets sont rentrés tous les jours (on va dire ouvrables) et que le site a satisfait 2400 entreprises, c’est que (250 jours *30 projets – 2400 entreprises satisfaites) 5100 projets (si calculé sur un an , on double si on parle de toute l’histoire de Sortlist) sont passés à la trappe ou ne se sont pas faits et Sortlist a permis à 32% de projets seulement de trouver le partenaire idéal. Bien que très théorique en terme de raisonnement, les chiffres annoncés sur le site poussent tout de même à réfléchir et à mettre en question le discours marketing.

+30 projets postés par jour, 37000€ de budget moyen, 2392 entreprises satisfaites

Face à cette réalité de terrain, nous nous sommes donc demandés : mais qui utilise réellement Sortlist et peut crier haut et fort avoir un ROI (Retour sur investissement, pour une somme x engagée sur Sortlist, cela vous rapporte une somme y en affaire) digne de ce nom ? A la suite d’un entretien téléphonique avec un membre de l’équipe Sortlist durant lequel nous avons exprimé le souhait d’avoir des renseignements à ce sujet, une liste d’agences nous a été transmise rapidement. Nous sommes allés au de-là, contactant notre propre réseau histoire de se faire une idée moins orientée. Au final, nous avons pris la température d’une réalité mitigée :

  • Les agences contactées n’ont pu annoncer plus d’un seul lead réellement gagné  via la plateforme
  • Les agences contactées ont fait l’expérience de leads de mauvaise qualité (sic « Il y a à boire et à manger sur Sortlist »)

Hypothèses sur la table

Pour conclure, nous émettons 3 hypothèses.

1. Le Business model de Sortlist n’est pas le bon

Faire porter le prix d’acquisition d’un projet sur ceux qui en assure la faisabilité, voir définissent une partie du cahier des charges de manière collective, sans garantir que ce pourquoi ils paient sera respecté, dilue attractivité et responsabilités. Si la responsabilité et l’implication se diluent à terme qui répondra encore aux sollicitations Sortlist ? Et sans agences désireuses de s’impliquer comment gagner de l’argent ?

Un switch vers le « success fee », si j’obtiens le marché je paie, donnerait sans doute plus de vitalité à tout l’éco-système, réduisant les critiques sur les sur-évaluations, la mise en compétition d’acteurs payant et d’autres.

Le gage de sérieux et de qualité des agences et donc la valeur de SortList mériterait aussi que ce success fee soit payé par les clients/leads.

2. Les beaux projets ne sont pas sur Sortlist

Qu’est-ce qu’un beau projet ? Oser la définition. On se mouille : Un projet qui va réussir.

Un projet où le commanditaire est impliqué parce qu’il est convaincu par son projet, a une bonne connaissance de ses besoins (idéalement un cahier des charges, au minimum une vision), est exigeant sur les services qu’il souhaite confier à des tiers et, enfin, dispose d’un budget adapté à ses ambitions. Sur cette base, en bref : ce commanditaire n’existe pas sur Sortlist.

Sortlist attire des entreprises (et des consultants) qui peuvent gratuitement mettre en concurrence des agences sans avoir à démontrer la volonté de faire de leur projet un succès. De l’aveu même de Sortlist : sur 3 demandes postées sur le site, une seule abouti en lead proposé aux agences.

C’est dommage car il est une chose vraie, les agences sur Sortlist sont de qualité.

3. Sortlist, c’est pour les petites agences

Entendu lors d’un de nos entretiens avec d’autres agences : « Sortlist c’est pour les petites agences comme nous dont les collaborateurs font essentiellement de la production pas de la prospection ». Sur papier , en effet, Sortlist vous offre un service sur une phase de projet où les petites agences sont souvent mal équipées (des vendeurs). C’est alléchant et donne l’impression que faire gagner du temps (et donc de l’argent). Dans la pratique, il ne s’agit pas uniquement d’une loterie où une agence sur 5 serait gagnante. Ni même d’un réel gain de temps. Si Sortlist s’est chargé du « hunting », il reste aux agences à mettre en place le « closing » et dans certains cas le manque d’aptitudes des équipes de production sur le volet prospectif se révélera sans doute tout aussi handicapant sur le « hunting » que le « closing ».

Comme tout autre projet innovant testé, nous ne nous arrêtons pas à l’arrière goût désagréable laissé sur notre expérience récente avec Sortlist. Il y a des facteurs analytiques qui permettraient clairement de mettre en place un service plus équilibré et juste. Puisse Sortlist évoluer dans ce sens. De notre côté, cette expérience nous aura permis de mettre en place une réflexion interne sur la valeur prospective au travers, notamment, de nos pairs, les « petites agences »… En Belgique on le sait l’union fait la force.